(Résistant-Maquis "Bir-Hacheim") |
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(…) Je suis né en 1924 à Sarreguemines (57), ville frontalière séparée de l’Allemagne par la rivière : la Sarre et son affluant, la Blies. En 1939, j’étais au lycée technique. Ma famille était originaire de cette région et ceci depuis plus de 3 siècles. On appelait cette contrée la « Lorraine Alémanique » à cause du dialecte, qu’on y parle encore aujourd’hui. Durant la guerre de 1870, mes grands-pères étaient soldats dans l’armée française. Après la défaite, ils étaient devenus allemands, chose qu’ils n’ont jamais accepté. En 1914, mon père, requis au chemin de fer, n’a donc pas été enrôlé comme soldat dans l’armée allemande, ma mère resta en France pendant toute la guerre. (…) Le 1er septembre 1939 les habitants des 300 communes frontalières avec l’Allemagne furent évacués vers des localités d’accueil situées dans le centre de la France. Etant natif de cette région, j’étais avec ma famille parmi ces évacués. Pour nous, la déclaration de guerre était l’aboutissement de tout ce qui s’était passé depuis l’avènement d’HITLER au pouvoir en 1933. Pour Sarreguemines, la localité d’accueil était Chasseneuil en Charente. (…) J’ai tout comme mes parents, ressenti l’Armistice comme une démission, une lâcheté dans les clauses de Rethondes, pas un mot sur le devenir des 3 départements, ce qui désorientait l’ensemble des habitants de la Moselle. Mes parents prirent très vite la décision de ne pas repartir à Sarreguemines, car les risques pour moi d’une incorporation dans la Wehrmacht étaient trop grands. (…) Si l’arrêt des hostilités pouvait être un soulagement momentané, la présence de PETAIN n’inspirait pas la confiance et son entourage encore moins. (…) N’ayant pas de radio, je n’ai pas entendu l’appel du 18 juin, mais la nouvelle fut répandue très rapidement dans le milieu des réfugiés. (…) Sa volonté de libérer la France à fait naître tout de suite un grand espoir et de ce fait donné confiance pour l’avenir. (…) Le 10 juin 1940, l’Italie déclarait la guerre à la France et l’Angleterre. Quelques jours plus tard, l’aviation italienne harcelant les colonnes de réfugiés à au passage sur Chasseneuil larguée quelques bombes. Il était prévu que la Ligne de Démarcation couperait la D27 en haut de St. Mary, à environ 4 km de Chasseneuil. Le 24 juin, dans la soirée, une unité de chars allemands précédée d’éléments motorisés, dépassait cette ligne, et vers 22H arrivait sur la hauteur qui domine Chasseneuil. En descendant la côte, après le 2ème virage, la tête du convoi fut accueillie par une mitrailleuse lourde placée dans l’axe de la route, à la hauteur du 1er carrefour. Aussitôt, les chars furent mis en batterie, prêts à bombarder la ville. Le château où habitait Edouard PASCAUD, député maire de Chasseneuil, ainsi que M. Nicolas NICKLAUS maire de Sarreguemines fut investi par les Allemands. Face aux officiers, les 2 maires firent front pour éviter la destruction de la localité. Les pourparlers furent facilités par le fait que le maire de Sarreguemines était bilingue, mais ils durèrent pourtant près de 18H. Pendant les jours suivants, une Ligne de Démarcation provisoire fut établie, au pont de la Bonnieure direction St. Mary. (…) Les motivations qui me poussèrent à entrer dans la résistance furent seulement liées au désir de voir la France libérée. Une seule ombre me posait un problème de conscience vis à vis de mes parents : Ils avaient tout abandonné en septembre 1940 pour me protéger ! Et moi, pour les remercier, je me lançais sans trop réfléchir dans une aventure à hauts risques ! (…) En juillet 1943, je rencontrais Mme NEBOUT par l’intermédiaire de M. H. CLEMENT, directeur de l’E.P.S. et de la Section Technique de Chasseneuil. Mme NEBOUT qui distribuait des journaux clandestins, me demanda de participer à son action. Quelques temps plus tard, elle était mise en relation avec André CHABANNE, par l’intermédiaire de Pierre GAGNAIRE. Ils se sont rapidement mis d’accord pour la création d’un maquis. André CHABANNE avait d’ailleurs fait creuser un « gourbi » dans le bois de Fougère, un village près de Cherves-Chatelars. Nota : la batterie de chars qui devait détruire Chasseneuil, se positionna à l’endroit même où fit ériger le Mémorial de Chasseneuil 6 ans après. Mon activité sportive était le football. Le président du club, vétérinaire à Chasseneuil était aussi vice-président de la Milice locale… (…) Le 1er octobre 1943, à la rentrée scolaire, je reprenais mes cours à la Section Technique en vue de passer un diplôme de dessinateur industriel. A cette époque A. CHABANNE, désirait avoir un Agent de Liaison, de surveillance et de renseignements. Mme NEBOUT me proposa, et il accepta. La 1ère fois que j’accompagnais Mme NEBOUT au « Gourbi » de Fougère, j’eu la bonne surprise de rencontrer Marcel GAUTHIER et René BARUSAUD, 2 Chasseneuillais. Fin sept. début oct., le maquis reçut un renfort inattendu. En effet, 5 gars équipés de mitraillettes STEN en provenance du parachutage manqué de Taponnat, étaient venus se réfugier à la ferme de Lavaure, appartenant à la famille PASCAUD. Parmi eux, Marcel MONTAUBAN, ancien élève de Guy PASCAUD. C’est par ce dernier qu’ils rejoignirent le « gourbi » de Fougère. Peu de temps après, G. PASCAUD s’était joint à Mme NEBOUT et A. CHABANNE. Dès ce moment, ils prirent chacun un pseudonyme : A. CHABANNE-« Blanqui » ; Mme NEBOUT-« Luc » et G. PASCAUD-« You ». Maintenant il était important que le maquis soit officiellement déclaré à un mouvement de résistance. Le choix s’est porté sur l’Armée Secrète (A.S.). La 1ère rencontre entre un responsable A.S. et G. PASCAUD eu lieu à CHABANAIS, un jeudi de la 2ème quinzaine d’octobre. A l’occasion du 1er nov. (25ème anniversaire de l’Armistice de 1918), le maquis se manifesta en déposant une gerbe au monument de la mairie, le soir du 10 à 23H. Sont descendus à pied du « gourbi » de Fougère, avec leurs armes : Henri BERTHOUT, Marcel GAUTHIER, Albert GIN, James LAGARDE dit « Charlot », Georges et Marcel MONTAUBAN et Pierre TOURNIER, accompagnés de PASCAUD, CHABANNE, de Mme NEBOUT et de moi-même. Ensemble nous déposions cette gerbe, et après avoir exercé une minute de silence, nous séparions avec beaucoup d’émotion. Pendant l’hiver 43/44 et jusqu’au 22 mars, je fus à la disposition des 3 chefs pour effectuer de multiples tâches indispensables et dont certaines qui leur auraient fait prendre le grand risque de se faire repérer. Après la catastrophe du 22 mars, le trio fut dispersé. « Blanqui » est resté avec le maquis, qui était alors à Plaimbeau. « You », avait été arrêté et emprisonné à la prison de Poitiers. Quant-à « Luc », elle était allée à Poitiers, afin de prendre contact avec la résistance de cette ville et tenter d’intervenir au mieux en faveur des prisonniers. En accord avec CHABANNE, que je voyais de temps en temps, je me mettais en veilleuse en attendant la suite des évènements. J’ai donc repris une vie normale et mes cours à la S.T., mais avec une grande angoisse étant donné que plusieurs prisonniers me connaissaient et auraient pu me livrer sous la torture. Les 33 maquisards du maquis de Négret pris les armes à la main, furent fusillés à Biard (Poitiers), le 8 mai 1944 et les autres résistants déportés. Parmi eux se trouvaient : Abel BONNEAU, Robert CLEMENT, Roger GALLARD, l’Abbé Jean QUICHAUD et Guy PASCAUD. Après le débarquement le recrutement du maquis se fit en fonction des parachutages d’armes. La 1ère Cie. fut formée début juillet et la 2ème Cie., le 10 juillet. Le 14, nous fêtions la libération de Chasseneuil, par un défilé grandiose (à souligné que tous les maquisards qui défilaient, avaient été habillés uniformément dans des vêtements en provenance d’un stock important de la gendarmerie Zone-Sud, entreposé à Chasseneuil même : Tee-shirts foncés, pantalons d’été, souliers en grande partie de ski). (…) Les actions auxquelles je participais, étaient essentiellement du harcèlement auprès des troupes allemandes qui circulaient sur la RN10, d’Angoulême à Ruffec. La 2ème Cie possédait son service auto et ses propres véhicules, ce qui lui permettait de réagir très rapidement. Elle possédait en outre un engin de reconnaissance pour les missions de repérage de l’ennemi avant des combats éventuels. Les attaques se faisaient hors agglomérations afin d’éviter les représailles, et près d’un chemin de dégagement pour pouvoir effectuer un repli rapide. J’étais le passager de la moto de reconnaissance conduite par Paul SOULNIER, neveu de G. PASCAUD. Je participais donc aux combats suivants : Doursenac et Chalus (Hte Vienne), les 11 et 12 juill.44. Les Negres (Charente) le 17 juill. 44. Oradour/Vayres (Hte Vienne), le 22 juill. 44. Salles Moussac (Charente), le 13 août 44. Champniers (Charente), le 19 août 44. Condac (Charente), le 24 août 44. Libération d’Angoulême, le 1er sept. 44. Matha le 4 sept. 44, St. Jean d’Angély le 5 sept. 44, Surgeres le 6 sept. 44, Rochefort le 17 sept. 44 (Chte Mme). Après la libération d’Angoulême, les parcours en moto pour les liaisons s’étendirent au fur et à mesure de la poussée vers l’Ouest.
(…) Du 6ème R.I. (ex Régiment Bir’Hacheim) je fus muté à Saintes dans une Cie de réparation auto qui couvrait tout l’entretien du matériel des unités des poches de Royan et de La Rochelle. (…) Peu de temps après ma démobilisation M. CLEMENT, toujours directeur de l’E.P.S. de Chasseneuil, me proposait en emploi de dessinateur industriel dans une entreprise qui versait régulièrement la taxe d’apprentissage à la Section Technique… |